2007 - Rêve Russe


le projet

Itinéraire et accès aux services de l'internet
Itinéraire et accès aux services de l'internet

De la porte du garage au Kremlin de Moscou à vélo , avec tente et réchaud. Traversée de la Bohème, visite de Prague, Varsovie avant la frontière internationale qui ouvre sur la Biélorussie, sa capitale Minsk puis sur la Russie, Smolensk et enfin La mégapole ... Moscou.

Sur la place Rouge se décide le retour par St Pétersbourg puis les pays baltes baignés par la somptueuse Mer Baltique avant la Pologne des Lacs, Berlin et l'ex Allemagne de l'Est et enfin ... la porte du garage.

Un périple de 7200km en 68 jours, une aventure pleine de charme dans des pays chaleureux, une aventure humaine dans des paysages inoubliables.

Une tranche de vie qui marque la mémoire.

Article 1 posté de Plzen (Tchéquie)

Bonjour à tous

 

Le 21 Mai, la pression monte avec les secondes qui s’égrènent. Toutes les personnes présentes me réchauffent bien fort et j’en ai besoin, mon objectif moscovite me semble bien périlleux. Il faut partir ... le stress déborde. Me couler dans ma peau de voyageur ne sera pas le plus facile. Je choisis la tranquillité du canal pour mettre mes idées en place, je tente de retrouver mes esprits. Espoir vain. Mulhouse, la Hardt, je semble m’apaiser, il n’en est rien. A Fessenheim, l’œil est noir, le ciel tout autant. Nuit orageuse à Vieux-Brisach. Le cordon ombilical n'est pas encore rompu.

 

 

Le 22, Foret Noire. 10 h, le soleil naît, la chaleur s’installe. La montagne grignote peu à peu mon paysage. Mes fringues de voyageur ne sont toujours pas à ma taille et pourtant déjà collées à ma peau. Ce soir, au bord du torrent dans l’ascension d’un second col je comprends que mon manque d’enthousiasme est dû au manque de dépaysement. A suivre

 

 

le 23, Tübingen. La Forêt Noire est physique avec ses côtes à 12% à répétition. En soirée je clos épuisé et pour cause, par 3 fois je me trouve face à des routes réservées aux voitures. Galère. Il me faut une carte plus détaillée. Indispensable. Je perds trop d'énergie sur ce point. L'Allemagne n'est pas le top pour les voyageurs à vélo contrairement à ce que l'on croit. Je dors enfin à Tübingen ; repos mérité. Les côtes françaises s'éloignent.

le 24 sur les hauts de Schondorf. Dans les moments difficiles la chance me sourit. Riche d'une nouvelle Map, si si, je peux enfin donner un sens à ma trajectoire germanique. Je commence à n'être plus très propre, mais un brin d'aventure me gagne... Si ce doit être à ce prix, alors que noir je devienne. Très fatigué, le profil guerrier des étapes n'y est pas étrange. Nuit en altitude, afin de superviser demain, et son flot de surprises.

 


le 25, j'entre peu à peu dans l'aventure comme à reculons alors que j'avance. Les soucis me noient. Je change la chaîne du véhicule mais les côtes restent abruptes, l’aventure ... ordinaire et modeste. La routine m'assaille, filons. Comme lors de chaque périple, disponibilité, bonté et sympathie rencontrées sont des raisons pour poursuivre.

le 25, la houle montagneuse semble s'essouffler. Je récupère. Nuremberg, gros bourg et gros orage. Ville pleine de vie et de CRS. L'un ne va pas sans l'autre. J ai aimé cette musique, cette ambiance, ce mélange de cultures. Pris par le temps et par les eaux, chargé comme un mulet, je dors avec les chevaux.

le 26, une semaine de bitume, pas de grandes villes mais de petites bourgades, pour certaines bien charmantes ; clin d'oeil touristique. Quelle amabilité ces allemands à mon égard, le voyage à vélo les séduit mais surtout les fait rêver. Ce soir alors que la frontière s'approche sans bruit, un terrible orage me plante sous ma tente. La pluie prend le relais et moi le repos avec la fatigue revenue. La nuit tombe de plus en plus tôt.

le 27, nuit cauchemardesque d'orages en série. Dernière surprise allemande, magasins fermés le lundi même les épiceries. Du neuf, voici la Tchéquie. Magasins tous ouverts, pas de liquide. Entre les 2 pays le contraste est saisissant, le dénivelé infernal, la météo extrême. Il va falloir tenir, le temps est complètement détraqué. A chaque instant suffit sa peine, la mienne est lourde.

le 28, nuit dantesque, la flotte par seaux... Je prends la route et vous écris de Plzen, grosse ville. A bientôt.

Article 2 posté de Hradec (Tchéquie)

Le 29/05, Je vous ai laissés à Plzen, grosse ville tchèque que j'ai pris plaisir à découvrir, mais chut, c'est un secret ! Je suis relativement déçu par la culture MacDo qui se palpe ... enfin je veux dire qui se voit. Dommage pour ce peuple maître de cette bohême qui m'a tant fait rêver mais aujourd'hui si ... européenne. Moulée quoi !!!! Mon oeil inquisiteur détecte ça et là des traces d'un passé si ... dépassé.

Le 30/05, Prague. La capitale était le joyau de cette étape, le souci également car les grosses villes sont de terribles labyrinthes, souvent très dangereux. Prague, contrairement à tous les aveux recueillis, ne m'a pas fait rêver, si peu même que je suis sûr de ne jamais y revenir. En vélo ce fut un chemin de croix, ce parcours découverte. Ville aux rues très pentues, trottoirs impraticables, monuments cachés aux 4 coins de la ville, trams mal intégrés dans la circulation avec ses propres trottoirs et les pavés pour faciliter le fonctionnement ; mon angoisse fut de tous les instants, ma visite trop longue. La sortie fut un sport de combat. Je me faisais un plaisir de cette découverte, ce fut un bide pire que celui du Tchèque. J'ai également trouvé un manque d'élegance global en retrait de celui que requiert une capitale. AMEN.

Le 31/05, j ai passé le cap des 1000 km, pris dans un flot incessant de camions. C'est aussi cela le voyage. Arrêt à Hradec, belle ville en pleine reconstruction à 40 km de la frontière polonaise.

article 3 posté de Kaluszyn (Pologne)

Le 31/05, je vous ai abandonnés à Hradec. Par manque ou par goût j'ai repris un peu de laminoir routier, la nationale, avant de clore en pleine campagne, loin de la route, sous un cerisier... aux fruits délicieux.

 Le 01/06, J'en finis avec la Tchéquie, non sans mal car les bosses routières fatiguent le chameau. La Pologne m'avale d un coup, goulûment mais ses routes sont infernales tant par la circulation que par ses côtes. Etape la plus difficile, sans aucun doute, ce pays est rebelle. Le contraste avec la Tchéquie est notable, il est beaucoup moins Européen donc bien plus intéressant, accaparant. L'inertie due à sa taille est probablement la raison de ce décalage. En fin de journée, alors que les plaines réapparaissent pour le repos du mulet, les cultures céréalières s'étendent à perte de vue. Dans ces conditions, l'angoisse de la nuit surgit, les pompiers de Braszowice m'offrent gîte, couvert et un flot de vodka jusqu'à une heure avancée de la nuit.

Le 02/06, courte mais bonne nuit. Mes hôtes m'offrent le petit déjeuner avec oeufs et lard, salade de tomates, et enfin saucisses au ketchup avec un café. Ils me conduisent à Zabkowice pour visiter rapidement le patrimoine, en particulier sa tour penchée. Départ à 9h30, pédaler n'est pas facile. La Pologne me donne une impression, je vais dire, ouvrière aux structures industrielles périmées, contrairement à la Tchéquie où la-bas rien ne semble avoir jamais existé. Visite de WrocLaw, énorme, superbe, une mine d'élégance, de beauté, un oasis de vie aux églises bien nombreuses.

Le 03/06, le ciel est à l'image de ce qu'il était hier en fin de journée, GRIS, SOMBRE, MENACANT et TRISTE. Dans la brume puis sous la pluie, je traverse d'énormes champs de culture sans aucun intérêt. Pour compléter le tableau, les gros bourgs sont insipides, les villages de misère. Journée laborieuse, à oublier, itinéraire ennuyeux.

Le 04/06, nuit dans une maison en construction. Ma meilleure idée de la journée. Je me réveille dans un environnement glauque, mais je suis sec. Important. Je retrouve cette Pologne bien triste, trop CULTIVEE pour moi ? Peut-être. Quelques rayons de soleil dans l'après-midi donnent un peu de joie et de gaîté à cette journée bien longue. Il faut dire que les surprises manquent, heureusement pas d'eau qui serait plutôt un tourment. Ma présence attire, mais tous pensent que je suis Polonais !

Le 05/06. Pour sûr, je ne passe pas inaperçu. Sous un fort vent d'EST, le beau temps ne vient pas. Etonnant. La Pologne monotone égrenne ses kilomètres peu enthousiastes. Varsovie s'approche, je ressens déjà sa présence. Nombreuses rues sans goudron mais pas un Polonais inactif. Je dors a quelques brasses du Lac Sulejowsic, aux rives tellement sauvages.

Le 06/06
Cap des 1500 km dépassé. Je roule sur de petites routes pas plus sûres que la 8 mais tellement moins saoulantes. Cette Pologne rurale, plus en parcelles, avec faucheurs et fanneurs manuels me rappellent mon enfance et le travail des paysans du village. A part quelques assoiffés, ici tout le monde est au boulot et croyez moi ce n'est pas ce qui manque. Mais à ce rythme y en aura t'il encore dans 5 ans ?

 Le 07/06. Haut-lieu de cette journée, Varsovie (photo), sous un soleil de plomb. le jour de la procession, des milliers de participants... et jour férié. Le stress a été à la dimension de la ville. J'ai bien donné et beaucoup reçu. La ville a de la majesté, de la grandeur, elle marie le présent et le passé, son gigantisme m'a bousculé. Bien que pris dans la manif religieuse, je parviens à découvrir avec un plan l'ensemble de l'oeuvre, même les immeubles de l'époque communiste. A ne pas manquer.

Le 08/06, ballade dans la nature sous le soleil pesant. Sacré climat continental ! 140 km avant la Biélorussie et le début de l'aventure. A bientôt mais cette fois je ne sais ni quand, ni comment. Les fées vont m'aider...

article 4 posté de Kobryn (Biélorussie)

Le 08/06, je vous ai laissés à la mairie de Kaluszyn. Internet gratuit, sympa cette commune. Je suis alors à 140 km de Brest, sacré tonnerre ! La splendeur de Warszawa dont je vous ai peu parlé, fut exaltante mais occultée par la proximite de la BiéloRussie. Mes pensées fuient devant moi, plus loin, toujours plus loin, là-bas loin devant. Le cyrillique encombre mon esprit. Pas une mince affaire. Je clos ma dernière nuit polonaise a Medzyrzecavec une cheville éléphantesque.

Le 09/06. Epatants, accueillants, curieux ces Polonais. Au matin l'un d'eux m'offre son déjeuner. J'accepte. La vie est belle, le souci la rend plus vivante. Dernière enclave Terespol, une dernière respiration, la frontière. Des files de véhicules. Il est midi. Mauvaise nouvelle, je dois franchir la frontière dans un véhicule à moteur. + facile à dire qu'à faire. Impossible de me faire comprendre. Un fonctionnaire m'aide. Un véhicule surchargé de biélo prend mes bagages, vélo et ma personne dans sa camionnette. A 5 la discussion est difficile, la chaleur infernale. La sueur coule, la voiture n'avance que par bons successifs : il y en aura 7 ou 8 pour une seule frontière. Incroyable ! Je dois remplir des papiers, reprendre une assurance, faire 1000 choses que je ne comprends pas. 16h je sors du labyrinthe et de la voiture, lessive. J'embrasse tout le monde et découvre Brest. Extraordinaire, bien au-delà de mes espoirs, je découvre un système communiste occidentalisé (photo : une épicerie d'Etat). Une certaine tristesse émane de tout cela mais les émotions sont fortes, pardon, foudroyantes, les filles splendides dans une mode un peu passée mais qui leur sied à merveille. Je file par la seule route existante en bitume. Les bus sont une histoire, les vieux camions une fortune pour les yeux. La pluie me rejoint au souper. Quelle journée.

Le 10/06, réveil dans les eaux. L'orage cesse à 8 heures, départ à 9 car je sèche la tente. Incroyable présence affective de ces gens. Ils me prennent beaucoup de mon temps, mais je leur dois bien cela. La route passe vite, avec toutes ces choses d'état que je découvre. Un trésor, je vous dis. Je stoppe à Kobryn pour tester internet. Ca marche, à plus.

article 5 posté de Minsk (capitale biélorusse)

Le 10/06, après votre visite je découvre Kobryn, surprenante ville soviétique. Les magasins sont, je pense, d'état. Tout le laisse à penser, surtout les vendeuses particulièrement sympas. Un plaisir que d'aller faire ses courses, chaque jour réitèré. La ville me file un bon coup de blues, je file par l'ancienne nationale pas toujours en bon état. 40 bornes de bois, de cultures, un grand bol de nature, un grand manque de vie. Nombreux marécages, eau omniprésente, les paysages sont intrinséquement beaux, la misère exposée, les moustiques en cohortes et turbulents. Royaume du pécheur, de la cigogne, de la verdure, je clos à 6?PO3A.

Le 11/06, les moustiques sont pour l'instant mes pires ennemis, ils sont si nombreux et moi si... seul et vulnérable! La bataille est inégale mais pas perdue. Apres réflexion, tout ici est en décrépitude : camions, immeubles ... aucune transversale n'est goudronnée, comment ceci peut-il perdurer ? Les peintures tentent bien de cacher les lézardes, mais tout est dans un tel état. Je suis heureux de parcourir ce pays en 2007, j'ai au moins à manger même si le choix n'existe pas. J'apprends, comprends, ressens tout ce que le régime communiste a apporté, le bon et le moins bon. Impressionné par la misère et la poussière de Baranavitchi, grosse ville affreusement laide. Pas gai de vivre ici. Je dors dans la dernière maison de la banlieue qui s'avère être une école. On m'apporte même des fraises.

Le 12/06, après les aventures, les mésaventures ordinaires. Une bande de jeunes bien informés est venue à la nuit. Le chef pouvait avoir 17 ou 18 ans. Le contact a été rude, l'affrontement a duré plus d'une heure. Nuit gachée, lunettes de vélo volées, rétro idem, mes 2 bidons d'eau dont une non potable et surtout une estafilade à la tente de 40cm. Contre un groupe on ne peut pas être partout. Dommage pour la tente qui ne méritait pas cela. Ce matin j'ai la rage et pas d'eau. La chaleur fait rage. Sans exception les villes sont démoralisantes, Stoubcy, Dzjarzynsk, de véritables tombeaux. La misère est énorme, la population toujours très présente à mes cotés, pour savoir et m'encourager. Bloqué par mon visa russe je ne peux même pas abréger les journées. Pour l'instant je comprends être le seul touriste et pour un certain temps encore ! Demain Minsk, un espoir dans cette horreur.


Le 13/06, Minsk. Pas vu une maison, que des immeubles. La ville est importante, parfois elle fait peur. Elle est en son centre un miracle du système communiste, la plus authentique jamais traversée. L artère principale est gigantesque, les immeubles staliniens, la chaleur énorme, les slaves étonnement dévêtues. La ville est partout en travaux, finiront-ils un jour car les outils sont dans un bien triste état. J ai trouvé la ville étonnante, à ne pas manquer mais elle n'aura pas submergé mon coeur et mes pensées. Je la trouve un peu triste et poussièreuse comme le reste du pays. Ecrasé par la chaleur, le bruit, le danger, quelques jours sont necessaires pour se faire une opinion définitive. Il faut ressortir du chaudron...

article 6 posté de Krasnyj (russie)

le 13/06. Après le cybercafé de Minsk, sortie de la ville facile mais oh combien périlleuse. Je dors paisiblement à quelques lieues de Zodzina. J'ai décidé depuis l’agression dans la banlieue de Baranavicy de ne plus faire confiance qu'à mon expérience. Les ours, loups et autres sangliers me font moins de soucis que l'espèce humaine. La limite entre privé et état est parfois subtile et je m'y perds. Par contre la vétusté de tout ce qui m'entoure est flagrante et mériterait à elle seule un roman. Ce soir face à mon lit douillet, au loin, un kolkhoze... qui fonctionne enfin qui semble fonctionner car malgré la gratitude de la météo, l'activité semble réduite. A présent, à moi la frontière mais avant, un peu de repos.

le 14/06. Au programme Barysau et des kilomètres de bitume. Maigre projet. Circulation forte mais pas stressante, avec d'après moi, des camions a 90% vides. Etonnant non ? Je pense toute cette activité factice sinon comment expliquer l'état de ce pays que je traverse. Pour la journée 2 villes : Smaljavicy et Barysau. Elles attaquent dur mon moral, car elles ne représentent en rien des cités. Formées de piles d'immeubles en mauvais état, submergées de poussière et au mieux en banlieue une cacophonie de pavillons bien tristes. A part ces cités fantômes, j'ai traversé la jungle, une forêt qui limite grandement la profondeur de vue.
Problème avec la transmission de mon vélo, uniquement 3 vitesses depuis plus de 1600km, mais depuis aujourd'hui, elle craque méchant et je ne comprends pas pourquoi. Arrêt à Bobr, village du début du siècle... sidérant et mauvais pour la vitalité, la mienne. J'ai dépassé les 2400km au compteur.

le 15/06. Retour des moustiques, mauvais comme des teignes. Je reprends cette grande route monotone et... Moscow 578km. Rien à dire. 80km de route sans autre élément que la nature, pas même à manger. Ma carte IGN est pleine d'erreurs qui m'occupent bien la tête. Tout est déjà difficile, alors si la carte donne des signes de lassitude. J'arrive à Orsa pour manger et surtout boire, boire. A 50 km de la frontière je me risque sur une petite route dans l'espoir de faciliter mon entrée en Russie ... Mon prochain défi !!!

Je vous laisse. Je reprends la route. A bientôt. Croisons les doigts. Marc

article 7 posté de Solnecnogorsk (russie)

Coucou, jamais vu des conditions internet comme ça. Pour les photos c'est rideau en Russie.

Le 16/06. Tout entier tendu vers cette frontière que je crains, je la franchis sans m'arrêter. Pris de remords, je reviens ; 36km de détour... pour rien. Le pauvre gars n'a ni cachet, ni rien pour valider mon passage. Je repasse à Krasnyj et prends des roubles. Chaleur lourde, vent d'est terrible, pays semblable à la Bièlo mais sans cette impression d'activités non terminées. Les habitants sont terriblement sympas jusqu'à ce que, surprise, un orage d'enfer me surprenne. Arrêt d'urgence dans le bar d'une station essence. Des trombes d'eau. Que faire, coincé entre pluie incessante et un futur qui s'assombrit ? 2600 km et bien embêté.

Le 17/06. La solution couchage m'est proposée par le patron. Dans le bar. Sauf que l'on est samedi soir et que jusqu'à 4h, bonjour l'ambiance, la Vodka et la bière ! Les Russes sont d'une générosité exemplaire mais attention au piège, ma vigilance ne doit pas faiblir. Départ très amical et très fatigué. Smolensk m'ouvre ses portes. L'Avir (bureau de police local) est fermé, le seul hôtel ne sait pas faire ce papier. Je reprends la route, soucieux. Je roule jusqu'à Jarcevo, ville terriblement déshéritée où toutes les photos ne sont pas à prendre. Fête dans la communauté russe avec Vodka, bière et musique. Soirée dansante. Dès lors qu'on lui donne un peu de liberté, la vie est superbe, extraordinaire. J'aimerais vous faire entendre... cette Russie que je vis. Je dors dans le bungalow du patron, mais pas assez longtemps.

Le 18/06. Le patron me mène à l'Ovir, univers de Kafka. L'administration ne peut m'enregistrer, il faut que ce soit fait par un hôtel. La boucle est bouclée. J'obtiens 2 jours de prolongation de délai, car en plus le délai est de 3 jours ! Pour donner un peu plus de saveur à cette journée bien énervante, je me tape la seule route disponible, un laminoir routier. Une horreur dont je sors intact ! Les Russes sont de + en + chaleureux, j'allais dire collants, la Russie moins envoûtante grâce à son administration crispante et bloquante. Après une visite sans intérêt de Safonovo, nuit a V'az'ma. Quel programme !

Le 19/06. Après la chaleur du peuple russe, le statisme et les incohérences de son administration, je me retrouve aux prises avec le service d'état. Extraordinaire ! Et le mot est faible. Il semble que seule la poste diffuse le service Internet. Une pauvre mamie apeurée par souris et clavier est responsable du système, le moindre problème est insoluble et trépigner ne sert à rien (je parle de la postière). Comme la journée est mauvaise, je finis mon tronçon d'autoroute. Ereintant, mais Moscou approche. Non enregistré demain, le délai expire. Pas moi. Noyé sous des flots de papier, ce pays étouffe, ce n'est pas moi qui vais les aider, mais par contre j'en veux à cette paperasse de m'occulter tout ce que je vois, entends et touche. Dommage alors que j'ai rejoint Uvarouka par Gagarin... Souvenez vous : le premier dans l'espace !

Le 20/06. Cap des 3000 km franchi. Sur l'ancienne nationale qui donne bien du charme à cet itinéraire, mais ma tête est cependant ailleurs. Arrêt à l’Ovir de Mozajsk, pourtant pas facile à trouver. Le plus haut gradé me reçoit, se démène, pour un résultat somme toute modeste... prolongation de 2 jours. Pas à pas, je retrouve les traces de Napoléon dans sa campagne de 1812 je crois. Mon Moscou à moi sera t'il en feu ? Internet introuvable. Mes problèmes vont me gâcher la partie russe de mon périple. En tout cas ils me prennent beaucoup de temps et d'énergie. Après je rame. Soudain à 30 km de Moscou, changement de régime, je passe du rural au citadin en l'espace d'une ville : Odincovo. J'y dors, entièrement tendu vers mon rêve : Moscou !


Le 21/06. Lever à la fraîche. La circulation est démente. J'entre dans les entrailles du monstre. Seul cycliste, j'évite de lutter contre les autres véhicules. Beaucoup d'immeubles anciens sont insérés dans des constructions actuelles, presque futuristes. J'entre dans le coeur, mon attention est soutenue, je demande le Kremlin. Il est là, à ma droite. J'y vais, j'explose. J'y suis ! HEUREUX et FIER d'être ici, au but fixé. Je n'avais pas d'idée sur le bâtiment, la Place Rouge, les églises superbes qui jouxtent cet ensemble. C'est fait, j'ai vu, c'est fort, très fort et remarquable. Ce n'est plus la Russie, mais il faut venir voir cet enchantement. Absolument.
C'est somptueux. Il faut maintenant rentrer.
Voyage dans la ville, je prends la direction de Tver. Une nuit de réflexion s'impose. Pourquoi pas St-Petersbourg ?
Deux tentatives Internet à Solnecnogorsk avant de trouver un PC qui fonctionne normalement. Les problèmes de langue et de cyrillique sont contraignants, mais je m'habitue doucement. Quelle journée, Moscou ! Baigné dans le flot des passants, le bruit des voitures, floué par cette géniale capitale que l'on sent vivre, respirer, ébahi par la vitalité de ses artères qui contraste avec la plénitude de ses parcs, j'ai compris que cette ville énorme était une consommatrice de tout ce qui se fait, se vend, se voit. Un abyme entre le Russe des villes et le Russe des champs. Admiratif et dépaysé sur la place des Nathalie’s (photo), j'ai moins apprécié la ville, assommante, bruyante, grouillante, trop réservée aux voitures et aux banques. Les Russes ne cachent pas leur intérêt pour $ et . Jamais je n'aurais imaginé ce luxe, cette débauche d'argent, de gaz d'échappement. A 3100km, n'hésitez pas à profiter du lieu, il est magique, mais attention aux charmes du Kremlin ... qu'ils ne vous retiennent pas.

article 8 posté de Valday (russie)

Le 22/06. Toujours pas d'enregistrement. Ce souci m'encombre la tête. A Klin, le seul hôtel ne comprend même pas ma demande, augmentant en cela mes angoisses. Avec la chaleur, les camions sont enragés et la route infecte. Heureusement, la Volga vient à mon secours et m'accompagne à Tver. Dans notre élastique Europe, la Volga en est le plus grand fleuve. Un grand hôtel, une hôtesse qui parle français, et enfin... mon enregistrement, la fin de mes tourments. Merveilleux instant, décompression rapide, le retour peut être entrepris.

Le 23/06. Dans le luxe d'une superbe chambre d'hôtel, mauvaise nuit, manque d'air, d'espace, de liberté. Dans ce lieu où tout s'achète, l'amitié n'est pas à vendre. Je me sens seul et les relations manquent de chaleur. Enfin l'heure du départ, sésame en main, j'en tremble. Mon vélo a disparu. Non, stocké dans un garage... la peur ! Je traverse la Volga, c'est ici que je quitte ce beau rêve. Dans forêts et marécages, une seule ville : Torzow, 100% russe. Ersatz de centre, immeubles disséminés dans une nature non contenue, poussière, terre... Une grosse déception. Pour couronner le tout, 50km de route complètement démontée, de ce fait particulièrement dangereuse. Les camions rugissent, sautent, grognent, cassent. Impressionnant. Jeté 2 fois au fossé, situation éreintante, pas d'itinéraire de délestage ! Survivre est une joie qui me suffit. En zone humide, le couchage n'est pas facile, je vous laisse imaginer. A partir de demain, je vous parle de la Russie que je côtoie. Promis.

Le 24/06. Seule ville au programme, Vyshniy Volochek. Au coeur des marais, bordant un immense lac, la ville ne manque pas d'intérêt. En ce dimanche j'y découvre les pratiques orthodoxes. Une longue file de pauvres à la sortie des églises pour recevoir la pièce du BON pratiquant. Je quitte la cité avec de bons sentiments et d'excellents souvenirs. Je roule dans un paysage aquatique de toute beauté, forêts magnifiques, comme me les présentait mon imaginaire. Sous la neige et dans les brouillards ces lieux doivent être sublimes. La magie des espaces opère, ce pays m'adopte.

Le 25/06. Après une bonne nuit, je découvre, un point Internet grâce à ma connaissance du cyrillique. Au bord d'un lac, Valday est une sorte de grand village dans la forêt au bord de l'eau. Avec ses maisons en bois, une sorte de Canada.

A bientôt, plus au Nord je pense.

article 9 posté de Kingisepp (Russie)

le 25/06. Reposante bourgade Valday, là où je vous ai laissés. Sa pauvreté affichée correspond bien à mon état d'esprit de cet instant. Ma journée sera un riche partage entre orages, dur relief et vent contraire efficace autant qu'infernal. Ces conditions équilibrent une journée entamée avec efficacité. Joies et déception font un bouquet auquel on s'habitue aisément. Je m'approche sans bruit de Novgorod afin de la surprendre demain matin. Ce pays est géant, je le mesure à merveille avec mon compère vélo, les espaces sont colossaux, les distances énormes. Sur ma route, que de villages en déshérence, de datchas abandonnées, est-ce le vilain bruit des camions, l'attirance des villes avec eau courante, proximité, travail... ? Les anciens résistent, moi je passe. Si je trouve une homogénéité dans ce pays, la partie Smolensk me paraît moins touristique, plus chasse et pêche.

le 26/06, Journée Novgorod, sorte de berceau de la Russie. Vent d'enfer et chaussée détruite ne m'empêchent pas de fouler ses rues de mes pieds parfois piétons. Une longue approche avant d'entreprendre la partie historique. Je me laisse transporter par le charme particulier de cette ville moyenâgeuse. Le détour était impératif, car à lui seul le Kremlin est un chef d'oeuvre, un témoignage en pleine rénovation, à ne pas manquer. Une grande convivialité me lie à ce lieu, à ces habitants, à ces pierres. J'aime ce côté provincial qui parfume cette journée d'odeurs printanières. Mon vélo qui me suit comme mon ombre est l'objet de nombreuses interrogations auxquelles je dois répondre, lui pas. C'est étonnant cette faculté qu'a le Russe pour imaginer que je suis russe ou du moins parlant sa langue. Je reprends la route, rien pour dormir, faute de grive... ce sera parking camions sur macadam et odeur de diesel.

 

le 27/06. Le Russe est formidable, serviable, avec un coeur grand comme on ne peut imaginer. Celui du parking me propose de dormir dans le mirador. J’accepte et laisse le mazout là en bas. Double chance. A 3h du matin un déluge propre à cette région s'abat sur mon nid. A 9h, il me faut laisser la place, je file... sec. Après 25km, trempé comme un croûton dans sa soupe, je déjeune. La pluie, humide compagne me lâche a Tosno, seule grosse ville de la journée. Son Internet est malade, décidément le service n'est pas un mot à la mode ici. De plus, cette façon de hurler pour répéter une chose que vous ne comprendrez jamais, me révolte silencieusement. Courage, il n'est pas question de vivre ici, alors patience. Client traité vraiment comme un consommateur... seule la personne derrière son comptoir décide. Etrange système. A 30 km de St- Petersbourg, j'espère ce soir une météo clémente car plongé dans les marais, trouver un couchage hors d'eau est un casse-tête.

 

le 28/06. La providence est là, elle me conduit devant un abri-chalet. Je squatte pour la nuit, je n'aurai pas d'autre chance. Aujourd'hui St-Petersbourg (photos). Magnifique avec ses appâts multiples tentants et délicieux, son histoire écrite dans ses murs, ses rues et monuments, ses influences diverses, multiples mais surtout aux accents de l'Ouest et bien sûr... ses bus entiers et nombreux de touristes venus du monde entier. Que de trésors dans cette ville mais pour le dépaysement c'est raté ! Au royaume de tous les excès, marteau et faucille enterrés, mon extase est visuelle, mon coeur n'est pas atteint. Je suis en quelque sorte dans un faubourg de l'Europe qui lisse et harmonise trop les paysages mais aussi les hommes et surtout leurs manières. Emerveillé par Moscou, la vie me manque à St-Petersbourg, trop de visiteurs peut- être, je ne sens pas battre le coeur de ce monstre qui m'a avalé, mais à coup sûr ni l'une ni l'autre ne reflètent cette Russie si pauvre, ces paysans dont le regard est toujours si triste.

 

Le 29/06. Superbe lieu, d'où une formidable nuit. Le ciel est au travail depuis plusieurs jours. Période rinçage. J'espère qu'à trop laver, le bleu ne deviendra pas gris. Je dois filer sans les photos.... A la première occase.

Je viens de franchir le cap des 4000 et suis à 40 km de la frontière russe. Il fait un temps de cochon et même pire.

Article 10 posté de Varbola (Estonie)

Plus de 4300 km alors que je vous écris, le ciel est bleu, le soleil chaud, tant pis pour eux, j'en profite.

Le 29/06. Vous m'avez suivi à Kingisepp, malgré des conditions météo exécrables. Mes progrès tant en russe qu'en cyrillique sont extraordinaires, il y a bon nombre de mots que je sais associer à mes besoins et retrouver dans tout ce fatras visuel. Bref, devant la porte, sous des trombes d'eau, mon fidèle compagnon patiente. Pour ma dernière localité russe, je suis gâté, l'adieu est humide et les photos bâclées. De plus ma carte IGN est fausse, du coup la frontière me surprend. Pour cyclistes et piétons, passage par de simples mais multiples portillons. Pas facile avec le mulet chargé mais aucun problème. A la sortie du labyrinthe, Narva. Pluie si forte, ciel si noir que retrouver mes esprits n'est pas simple. Je peux toucher les nuages mais ce sont les eaux qui m'inondent, le porte-carte est un bocal... manque le poisson rouge. Avec bourrasques et intensité des ondées, reprendre la route demande un peu de volonté. Je roule dans la nuit alors qu'il est 18h. Je perçois un autre monde, mais les traces d'un passé lié à la grande soeur russe sont nombreuses et vivantes. Mon souci est autre, je ne peux pas monter ma tente, l'estafilade de ma rixe biélorusse réparée par mes soins ne saurait résister à une baignade prolongée sur un sol si détrempé. St-Christophe m'entend. Un camping, un peu de confort, la tente au repos mais cependant, impossible de me réchauffer alors que mes pieds flétris témoignent de la dureté du combat d'une journée historique... par ses conditions climatiques épouvantables.


Le 30/06
Sec, la route me reprend. J'ai réservé ma rencontre avec la Baltique pour un pays Balte. Ce sera l'Estonie à Sillamaë. La ville a de forts accents russes (photo ci-dessus), mais pour la côte c'est le choc. Rivage sublime côte vierge et intacte, nature sauvage. Quel bonheur devant ce spectacle. J'ai longtemps patienté pour ce face-à-face, j'ai choisi le lieu idéal. Je passe bien du temps, l'eau est même agréable alors que je la pensais froide, et avec les ondées d'hier elle est juste bien remplie. J'imagine ce littoral lorsqu'il sera la proie des bâtisseurs... et je me dis que l'avoir préservé jusqu'à présent est déjà formidable. Subjugué par cette mer, je la poursuis jusqu'à la pointe de Vainupea, au phare et ses mouettes, et dors dans cet Eden.

Le 01/07. Après une soirée de toute beauté, une nuit bercée par les oiseaux volubiles. A travers la réserve "Lahemaa Rahvuspark", la promenade est agréable, les kilomètres s'empilent. Voici Tallinn après plein de km parcourus sans aucun village. Capitale de l'Estonie, elle ne m'apparaît pas monstrueuse, mais petite, mignonne, propre et bien au chaud dans son enceinte. Entièrement tournée vers le tourisme, elle explose sous le nombre de ses visiteurs de tous pays. Dotée de nombreux joyaux, elle ajoute ses traditions folkloriques et ses pierres qui, elles, ne mentent pas. Tout ce monde m'assomme, me saoule et me fatigue, je préfère ma solitude matinale à cette sollicitude de fin de journée dans des rues bien échauffées.

Le 02/07. Epuisé après 130km de bitume et les feux de Tallinn, j'ai dormi en contrebas de la nationale, près d'un ruisseau. Le bruit ne m'a pas dérangé. Sur la selle qui parfois me démange, je suis surpris par ce pays où rien n'existe entre des villes très disséminées et éloignées les unes des autres. Vitesses respectées malgré les grosses cylindrées, parc véhicules complètement rénové, immeubles comme habitat citadin, sont les principales caractéristiques que j'analyse en pédalant.

article 11 posté de Bauska (lettonie)

 Depuis le petit village de Varbola où j'ai fait escale pour vous donner des nouvelles, j'ai l'impression que les choses s'accélèrent. Entre le quotidien, le change, les frontières et les capitales, l'activité ne manque pas. Pédaler devient un loisir, pour prendre les 4700 km au compteur, au départ ce matin. A présent, à Bauska, je sens comme une frontière s'approcher.

Je reprends donc au 02/07. Depuis le départ, la route est monotone, les villages pas rares... absents. La halte à Varbola nécessite un détour, la connexion Internet gratuite. A vrai dire, l'aventure me manque, elle m'a fuit à la frontière Russe, je m'en doutais, je le craignais. La rencontre n'est plus ce qu'elle était, probablement une conformité, l'émotion s'est évanouie, les surprises n'en sont plus, même les soucis ont disparu, mon environnement est devenu gérable ! Par chance le temps est redevenu instable, très capricieux, il sera mon piment. Ce périple avec le retour en zone Euro s'est transformé en un banal voyage non organisé, presque une sortie familiale. Après une journée de forcing dans un paysage uniforme, je retrouve enfin la côte Baltique à Pärnu, charmante station qui ne met pas en valeur ses atouts... bien au contraire, c'est peut-être pour cela que je l'ai tant appréciée ! Ici mon attelage fait recette, les contacts se nouent, je partage ma soirée avec un biker allemand et une légion de moustiques en furie. La mer est à nos pieds mais il faut battre en retraite. Nous discourons jusqu'à la nuit pour rattraper le déficit d une journée cruellement morne et plate. Voyager ou vivre, c'est rencontrer, partager, offrir et recevoir, c'est voir, regarder, entendre et si le soleil avive les couleurs c'est que le rêve va se briser. Cap plein Sud depuis Tallinn, les nuits rallongent... c'est plus que perceptible.

Le 03/07. Peu de point de repère dans cette journée... je colle à la mer comme mes vêtements à ma peau. Que la direction est plein Sud, que l accessibilité à la Baltique est trop rare, que la route est bruyante... enfin son trafic et que je passe la frontière avec la plus grande légèreté qui soit. Me voici en Lettonie et débute la comparaison entre les Etats Baltes. Sur cette journée non palpable. Peut-être est-ce dû à cette route harassante et sans saveur qui en est la raison. Déjà l'Estonie me semble loin et Tallinn le passé.
En fin de journée je recolle avec 3 français à vélo dont on m'avait annoncé la présence le matin. Le macadam est un excellent vecteur d'information et de communication. 2 hollandais se joignent à nous... pour la photo ! Lancinante, ennuyeuse, heureusement que cette route charrie de si nombreux et joyeux... randonneurs.


Le 04/07. De fortes pluies nocturnes et matinales restent sans conséquences sur mon équipement. Le soleil revient pour mon entrée à Riga. Le temps de trouver mes repères, la visite commence. Comme Tallinn, Riga est la ville d'une histoire, d'un passé, d'une vie qui se perpétue dans le temps. Elles sont si différentes que je ne sais les comparer, étrange pour des pays que je trouve si semblables. Elles ont par contre un taux de tourisme très élevé et un charme particulièrement provocateur. Dans la chaleur, les filles me semblent bien jolies, mais ma casquette est peut être trop petite et le soleil trop fort. Riga dispose de tous les atouts pour devenir grande mais surtout qu'elle reste ce qu'elle est : une perle magnifique cachée dans un écrin de verdure. Journée réussie... visuellement ! Grande rigolade avec 2 Polonais (photo) partant pour la Scandinavie. Le temps passe trop vite.

Le 05/07. Je reprends le guidon, à peine refroidi de la veille. Un vent assassin me fait face. Difficile de rouler à 14 et pas sur une heure. Mis bout à bout les kilomètres s'entassent. Bauska me permet un repos bien mérité. Je vous laisse ici, mon vélo piaffe... enfin je l'espère !

article 12 posté de Birstonas (lituanie)

Le 05/07. Tout allait pour le mieux lors de notre dernière communication. C'est en descendant l'escalier de meunier du cybercafé que la chute a eu lieu... sévère. Pas de casse mais douleurs multiples, surtout au dos probablement comme tous les meuniers. En camping, le dos n'est pas important, je dormirai sur le ventre ! Je me souviendrai de Bauska qui n'a par ailleurs pas grand intérêt. A 18h après une journée de lutte contre un vent terrible, je franchis enfin la frontière Lituanienne et la pluie gaiement m'accompagne. Tout ici est extrême, ce qui est également le cas des précipitations. En fin de journée, contrairement à ce que je pensais, je dois admettre que paysages, habitants et modes de vie sont issus du même moule. Je ne fais pas de différence entre ces Pays Baltes, tout au plus ce dernier est-il un peu plus modèle et un peu moins boisé. Par contre, plein Sud depuis des centaines de km, je sens, malgré l'abondance de l'humidité, le fond de l'air se réchauffer, je mesure à quel point j'étais très au Nord de mon village, je me fais difficilement à la tombée de la nuit de plus en plus tôt.

Le 06/07. Que de flotte en soirée et durant la nuit, mais au matin ... silence. Le vent porteur me promène à travers une campagne, au gré des hameaux, je dirais même des mini fermes avec 2 ou 3 vaches. Je reste étonné par des bus bondés, des hauts talons qui émergent d'un sentier en terre, du nombre de fumeurs, de l'absence de routes goudronnées, du traitement des déchets (à peine mieux qu'en Russie) et surtout de la "gravitude" des visages. A confirmer dans les jours à venir, mais je regrette également l'absence de style, d'architecture digne de ce nom en dehors des capitales. En échange, que d'immeubles à la norme qui sévissait avant cette indépendance si chère. A Panevezys, le ciel mauvais colle à mes trousses. Que d'eau jusqu'à Ukmerge ! J'ignore que ce n'est qu'une mise en bouche. Le déluge me surprend sur l'autoroute. Si si, ici je suis autorisé ! Tous ces dégradés de vert et de verdure s'expliquent. Sous la pression des flots, je monte ma tente en urgence dans un bois. A 20h, l'eau entre par l'estafilade biélorusse. Panique. Urgence. J'utilise mon pantalon "pluie" pour stopper l'hémorragie. Je ne peux plus rien faire sinon... dormir. Angoisse. Quel raffut sous la tente. Dans les conditions qui sont miennes à présent, toute action anodine requiert un engagement et une énergie démente.


Le 07/07. La pluie joue non stop. Je plie mon barda sous les eaux. Pas facile, mais l'emplacement était judicieux, l'inondation évitée. 22 km, entrée dans Vilnius, trempé... jusqu'à l'os. Je visite à pied pour me réchauffer et m'éviter de la fatigue. Il faut dire que toutes ces villes ne sont que trottoirs très hauts et escaliers. A vélo, c'est rageant. Prendre des clichés sous la pluie... un exercice. Le tour des centres d'intérêt clos, mon enthousiasme est mitigé, est-ce dû à cette pluie qui me fatigue ? Je crois surtout qu'on m'en avait trop vanté les charmes, et même si ceux dont elle dispose sont indéniables, son histoire me semble moins marquée, moins présente que celle de ses 2 soeurs. Pour vivre, elle est probablement géniale, pour découvrir, elle doit être vue avant les autres. Je reprends la route... enfin je veux dire la mer. Les paquets d'eau me fouettent et me glace jusqu'à la mœlle. Mon compte est bon, je pénètre avec conviction dans un complexe de vacances et m'installe dans un garage libre. La survie est à ce prix.


 Le 08/07. Réveil. Rien n'a changé. La journée va être difficile. Je change d'itinéraire et choisis la région des lacs afin, d'après moi, de bénéficier de plus d'infrastructures. Un vent terrible de face, la violence de l'eau, parfois sous les effets combinés des éléments, je suis en équilibre sur la bête qui, elle, ne renâcle pas. La région est magnifique mais comment en profiter dans de telles conditions ? Dommage d'être privé de tous les plaisirs qui m'entourent pour me concentrer sur un seul point : avancer. Dans de tels extrêmes, 50 km sont ma limite. Je clos cette journée terrible à Birstonas et dors chez une vieille dame, trop contente de m'avoir à la maison. Je profite d'un accueil chaleureux au point Info pour venir vous y conter mes péripéties. Cette soirée va être confortable, mais demain les même conditions sont à prévoir, ces nuages que je peux saisir de la main lorsque le vent m'en laisse le loisir.

 

Le Cap des 5000 km est franchi, mais à la vitesse de ces derniers jours, je ne sais pas si je serai parmi vous avant Noël. Les conditions rencontrées sont probablement les plus dures que j'aie eues à connaître, le moral va bien, l'aventure est forte, le plaisir... totalement absent, la débauche d'énergie : géante.

Article 13 posté de Itawa (Pologne)

Le 08/07. Ce soir à Birstonas, dans mon palace, je suis le plus heureux de tous, mais demain peut-être que personne ne souhaitera être à ma place. Mais en attendant, vivons l'instant si doux. Dans ce lieu tout nouveau, tout m'est étranger, Après une telle journée tout ce confort me dépasse, dire que je vis toute l'année dans ces conditions !

Le 09/07. Miracle, après plus de 60h de pluie ininterrompue... elle s'arrête. Enthousiaste, j'en embrasse ma logeuse et enfourche ma monture, elle aussi satisfaite. Le vent est identique à celui de la veille, mais, sans cape, la lutte est déjà plus égale. Décevante la ville de Prienai, j'en attendais, sans raison, davantage. Je n'y fais pas de vieux os. Un peu au bout du rouleau, je parviens à Marijambole. Nouvelle déception, peu de chose, la photo est difficile, les sujets sans intérêt. Dernière bourgade Kalvarija, dernière image de la Lituanie avant la Pologne que je retrouve. Les Pays baltes auront été une surprise un peu fade après la Russie. Ces grands espaces pour des pays si petits... incroyable et toute cette paternité russe... Je me laisse emporter jusqu'à Suwatki, grosse ville qui me ramène aux horizons polonais. J'y trouve quelques raisons de m'y plaire et d'y flâner malgré l'heure tardive. Je dors avec les routiers à la sortie de la ville. Pourvu que le temps tienne.

Le 10/07. Installé sur une fourmilière, le réveil est actif. Je dois me débarrasser de toutes ces travailleuses. Quel boulot ! Pour m'aider, la pluie me saute dessus... l'histoire s'accélère, je m'élance sous la pluie battante. Moral bas, reste un peu de volonté. Augustow, difficile de distinguer eaux du Lac et eaux du Ciel. Je voyais cette ville plus grande mais, avec les torrents qui se déversent sur moi, peut-être que même ma vue tombe. Long arrêt, je récupère. Se replonger dans ce bain n'est guère tentant. La route, elle, est en forme. Glacé, j'atteins Etk, son exubérance contraste avec la mienne. Frigorifié, je n'y accorde pas le temps qu'elle mérite. Trempé, gelé, une baraque au camping d'Orzysz... Chance incroyable, prix idem. Impossible de me réchauffer et quel gâchis cette journée, tous ces lacs et ce spectacle dilués par une méteo bien capricieuse.

Le 11/07. Confortable demeure, nuit réparatrice avec polaire et veste. Pour quelqu'un qui prétend ne pas être frileux ! Plus encore qu'hier, la région des lacs est superbe. Elle retient toute mon attention, sans pluie je savoure l'instant. Le lieu s'accorde parfaitement à ma vitesse. Gros relief, plutôt incessant relief, mes mollets confirment. Ce modèle du terrain donne du volume et de la profondeur au paysage souligné par un bitume de mauvaise qualité. Lieu le plus touristique de mon périple, courtisé surtout par les Allemands. Le temps n'a plus d'importance, je me sens bien, toute cette vie qui m'entoure, pour une fois ne me fatigue pas. Quel plaisir renouvelé à Okartowo. Olszewo, Mikatajki et Mragowo. A voir.

Le 12/07. Le ciel se gâte dès l'aube, la région des lacs continue. A 8h je découvre Olsztyn, ville intéressante avec vieille ville et architecture. Le ciel est menaçant, la température fraîche. Je roule avec polaire et veste. Mois pourri ! Les lacs sont moins présents, souvent plus éloignés, mais leurs eaux m’habitent et m’offrent de belles perspectives bleues. Ostrada, le détour n'était que pour le lac et voir un peu de monde, car la route en très mauvais état est très végétale ! La pluie arrive à la sortie de la ville. Elle ne me lâche plus. Je m'arrête à Itawa et évite 2 terribles ondées.

Article 14 posté de Gorzow (Pologne)

Le 12/07. Je vous quitte, dehors le ciel d'encre ne me sourit pas, le sol est une pataugeoire. Je claque des dents, l'humidité me transit, os inclus. Séquence photos très sportive, puis au risque de reprendre un surplus de liquide, je décide de me réchauffer en pédalant malgré l'heure un peu tardive. Incroyable, alors qu'il fait presque nuit vu l'opacité des nuages, la pluie m'évite. Peu à peu je m'éloigne de l'enclave russe de Kaliningrad que j'aurais bien aimé traverser. Dans la Région des Lacs, je suis heureux comme on peut l'être lorsqu'on n'est pas poisson. Je dois également parler de ma motivation qui vient en grande partie de tous ceux qui m'accompagnent dans cette aventure. Dans les instants difficiles, il est bon de puiser son énergie dans celle des autres. Ceci est aussi pour moi une grande découverte.

Le 13/07. Ce soir, le cap des 5600 est franchi, mais avant, oiseaux et animaux de la forêt, m'ont tenu un discours auquel je n'ai su répondre. Formidable, ce qui n'empêche pas le ciel d'être d'un gris délavé et triste. Hormis quelques hameaux, le circuit est champêtre, parfois boisé. Depuis toujours me semble t'il, le vent est de face, mes forces sont en déclin. Enfin Grudziadz, très grosse ville mais sans Cybercafé. je parviens cependant à accéder à un PC de par ma persévérance... récompensée par la pluie ! Dompter cette cité pour la comprendre est un long travail que je mène pourtant à bien. Sous son apparence ouvrière, elle est avant tout une ville de coeur, dans laquelle je prends beaucoup de plaisir. Son accueil est à l'image de ses rues... pas ordinaire. Alors que sortir de la ville est complexe, la route m'est subitement interdite. Un gars à vélo me guette, rayonnant est son visage lorsqu'il me mène hors du labyrinthe. Etrange ces accumulations de hasards qui me permettent d'avancer...

Le 14/07. Brusquement, le chaud me plonge dessus, sans transition. Je ne me plains pas mais les sautes de température sont comme celles d'humeur... déstabilisantes. J'entre à Bydgoszcz. Malgré sa taille, je la trouve bizarrement à la mienne. Intéressante, agréable à découvrir, j'en déguste les moindres dédales avant de l'oublier dans l'océan de mes souvenirs. Sur la route, le vent de face toujours aussi agressif me pompe ma vitalité. Je n'ai jamais envisagé de faire le retour contre Eole, en aurais-je simplement la force ? Deux arrêts-récup à Naklo et surtout à Wyrzysk dont les arrière-cours sont dignes de Zola.

Le 15/07. La chaleur (45° à 11h), les bosses terribles et incessantes et le vent de face atomisent mes offensives et me laissent épuisé sur le macadam. J'adapte mon allure aux conditions. Grosse ville sans intérêt Pila, contrairement à Walcz en équilibre entre ses 2 lacs. La journée sera physiquement difficile. Je n'ai pas encore parlé du paramètre important que sont les odeurs. Ce voyage en aura été une collection à l'exclusion des odeurs fortes exhalées par les cadavres des animaux victimes de la route (j'ai même vu un énorme sanglier dans le fossé).

Le 16/07. La chaleur est pire encore qu'hier, la route aussi en forme et le vent toujours vaillant. Les lacs sont fréquents (photo), je bois beaucoup, m'alimente peu. J'atteins enfin Gorzow, à part son église, rien à dire. Car ce qui fait la force de la Pologne, sa chaleur et sa proximité, sont ici un peu trop diluées. Je n'ai jamais autant vu d'animaux sauvages que durant ce périple, je ne parle pas des morts... La Pologne tellement catholique va m'abandonner, je suis à moins de 50 km de la frontière alors qu'au compteur j'approche les 5900 km.

article 15 posté de Brandenbourg (allemagne)

Le 16/07. Les rues de Gorzow où je galope à tout va sont étouffantes, heureusement... pour tout le monde, autochtones inclus. Cette fois la direction "Allemagne" est clairement affichée. Une excellente nouvelle toutefois, la route est toute plate, désespérément plate, je me pince pour y croire. Manquerait plus que le vent cesse ! Je prends plaisir à engranger les km avec un effort minimum. Formidable, cela marche. Je dors rassasié a 20 km de la frontière. Soirée étouffante qui me fait craindre le manque d'eau... potable.

 

Le 17/07. La Pologne se tarit au rythme de mon pédalage... rageur, comme si j'avais quelque chose à venger. Ce pays m'aura beaucoup plus enthousiasmé que je ne le pensais. Sans aucun souci, j'entre en cette Allemagne qui était autrefois de l'Est. Elle ne présente aucun trait paysager qui puisse faire penser que l'on a changé de nation. De plus la chaleur persiste, le vent également, les côtes se sont délayée dans une nature ici encore bien sauvage. Le gros bouleversement est dans la cohabitation routière. Voici que le respect du cycliste apparaît en meme temps que celui des règles du code de la route. Ceci donne une grande paisibilité au voyageur. A Seelow je fais un arrêt pour m'imprégner des us allemands, comme par exemple les jours de fermeture des magasins d'alimentation ... Pour profiter au mieux demain, je pousse dès ce soir au camping de Berlin. Les adresses données à l'OT de Seelow sont des magasins. Grâce au concours d'un brave cycliste berlinois, je parviens à atteindre le camping ... atomisé par une journée trop chargée.

 

Le 18/07. Je considère Berlin comme le dernier haut-lieu de ce périple, pas mon dernier point dur ! Réveil difficile, crampes, les séquelles d'hier se rappellent à mon bon souvenir. Plan à la main, j'engage un long combat de rues. La visite est exquise, les plaisirs multiples, le vélo un régal, la chaleur orageuse, les surprises infinies, la fatigue monstre, les repas sautés, la soif incessante, la tour du centre une horreur et les vestiges du mur décevants. Que de travaux de rénovation sur la partie Est, ce qui donne une impression de banlieue a l'Ouest. L'Allemagne fait tout et sait tout faire... en grand. Berlin a travaillé accords et gigantisme, son patrimoine bien moindre que que celui de London ou Paris est largement mis sous les feux. La circulation à vélo est simplement un délice sans risque. Cette ville a été étudiée pour supporter 20M d'habitants, cela se sent. Impressionné par la ville, elle est fatigante par les kilomètres, fascinante par ses charmes, mais attention ici tout me parait énorme, un pari je pense pour entrer en concurrence avec ses 2 grandes rivales, pour moi pari réussi. En fin de journée très longue sortie sur Postdam. Mort, c'est là que je me trompe, pars complètement à l'ouest et me retrouve aujourd'hui à vous écrire de Brandenbourg.

 

Le 19/07. Après une nuit, moustiques et les limaces font leur grand retour. La chaleur persiste, la promenade sur les pistes est un régal. Les automobilistes locaux sont d'un fair-play incroyable, je crois rêver.

article 16 posté de Bamberg (Allemagne)

Bonjour, le cap des 6600 est passé, le plus dur est fait. Il fait soleil mais ce n'est pas béton, car des nuages balayent inlassablement ce ciel jamais vraiment bleu. J'ai pris ce matin un malin plaisir à emprunter les pistes cyclables qui, par moment, m'amusent et à d'autres me font faire du jeu de piste. Ce matin donc j'ai roulé à travers des champs et des routes que l'eau recouvre. Les 24h de précipitations actives ont eu un effet immédiat. Les crues sont sévères. Arrêt détente et plaisir à Bamberg. Son tourisme m'étouffe, tellement il est présent... Quel monde !
Mais reprenons.


Le 19/07. Belle ville que Brandenburg, toutes ces étendues d'eau donnent éclat et azur au paysage. C'est ici que ma trajectoire plein ouest bifurque plein sud. La route est étroite (cela me comble) d'autant que la conduite allemande est irréprochable. Si seulement ce modèle pouvait se développer dans toute l'Europe... Elle rendrait à la cohabitation des modes de transport un luxe qui me fait rêver. Heureusement qu'il y a tous ces petits bonheurs qui me font oublier que même si la route est encore longue, malgré tout je rentre et que bientôt je retrouverai confort et habitudes.

Le 20/07. Journée captivante dès l'aube avec le passage de l'Elbe par bac pour découvrir au long de la journée la petite ville de Akem, les délices vertueux de Kothen et la superbe ville de Halle qui mérite bien plus qu'un détour et davantage qu'une halte, tout cela dans un environnement champêtre de qualité. La culture de l'éolienne est dans cette région incroyablement développée. 28° à 8 h du matin, la chaleur est trop lourde. Résultat, l'orage me cloue à Weissenfelt en fin de journée. Par chance un Mac Drive m'abrite des trombes d'eau que le ciel déverse. Il est 19h, il fait presque nuit, ça tombe sévère, la foudre bruyante est une compagne. Comment va se clore cette soirée ?


Le 21/07. Hier la pluie a cessé à la nuit. J'ai eu le temps de monter ma tente. Chance ! Il en faut avec ce temps. Ce matin je suis entré dans une zone montagneuse qui ressemble de loin aux paysages vosgiens. Les côtes ne me laissent pas de répit, les pourcentages très élevés m'épuisent. Juste récompense à Naumburg, aux pierres bien nombreuses, aux automobiles interdites. Dans ce calme qui s'accorde au lieu, l'orgue distille ses musiques religieuses ... belle distraction ! A Jena, je croise à nouveau les chemins pris par Napoléon. Si la bataille fut mémorable, la ville est elle... très quelconque. Weimar manque d'histoire et après tout ce que je vois, je deviens difficile. Sous la pluie, l'inquiétude climatique me gagne. Le dénivelé reste ardu, l'orage me plonge dessus, incroyable déferlement des eaux. Arrivée maritime à Erfurt qu'aucun mot ne saurait décrire. Tout est à voir et à voir mais les deux églises côte a côte sur le promontoire sont sans égal. Magique ! Je grogne après mon timing et la pluie qui ne me permettent pas d'apprécier ce lieu à sa juste pointure. La pluie ne me lâche plus, le climat est idéalement exécrable. Une accalmie pour m'installer !

Le 22/07. Nuit de gala. Après la pluie, orage violent avant la sirène puis enfin les pompiers. Dormir dans ces conditions n'est pas une mince affaire. Au matin, je patauge, le sol dit stop. Moral bas, comme le ciel. En fin de matinée, la délivrance, enfin un peu de douceur. Partout les terrains sont inondés. Le bitume court sous mes roues et m'entraîne à Arnstadt, très agréable, Ilmenau beaucoup moins convaincant, Schleusingen un refuge de pierres et d'histoire avant Coburg un puits de mémoire mais bien longue à apprivoiser. Cette journée montagne m'a remis en forme et donne du tonus. Physiquement au top, j'ai l'envie qui renaît. A Coburg, je retrouve l'Allemagne que je connais, celle où je suis comme dans mon pré derrière la maison. Pour l'instant pas de différences fondamentales entre les deux parties de l'Allemagne. Mon activité m'empêche de penser au retour qui s'approche !

article 17 posté de la porte du garage

Hier soir, à 19h, je gravissais ma dernière côte, celle de la rue du Lac à Evette. Devant la maison, un rituel bien sympathique... un comité d'accueil. Comme chaque fois, cela me fait chaud au coeur et j'apprécie cette occasion de se retrouver, une excellente chute à une aventure ordinaire menée à son terme. Calicots, rires et embrassades noient ma satisfaction individuelle dans cet élan collectif bien plus important, du moins à mes yeux. Avec plus de 7200 km, le Rêve Russe perdure une partie de la nuit.

Le 23/07. Après les news, la sortie de Bamberg est une ascension qui tue par sa verticalité. Route peu fréquentée, vent absent, je frôle mes records de vitesse. Tout s'emballe, 18h45 le ciel noircit, 19h arrêt, 19h15 orage, tente montée et moi... dessous ! 6700 km, je médite sur les manques à venir, fini les urgences répétées, les paysages, visages et bourgs extraits de l'ombre !

Le 24/07. L'humidité persiste, drôle d'année ! Enfin, pas très drôle ! Entouré par les vignobles, ma confiance renaît, ce ne peut être le vin et l'eau. Le vent me contrarie, les vallons allemands également, Wurtzburg doit être l'occasion de reprendre un peu de vitalité, dommage que la pluie gâche le séjour et donne un mauvais aperçu du lieu. Dépense d'énergie énorme dans des conditions qui évoluent peu. Je clos à Mosbach bien péniblement. Cette fin d'aventure ne tournerait-elle pas en en circuit touristique ? Je mélange toutes ces villes parfaitement propres, re-fabriquées, au patrimoine valorisé.

 Le 25/07. On ne change pas une équipe gagnante, vent et bosses persistent. Grosse journée avec en point d'orgue et en fin de journée... Karlsruhe. Les abords de la ville sont rébarbatifs pour qui circule à vélo, mais une fois la clef trouvée, l'entrée est directe, le coeur offert. J'avais toujours craint d'aborder ces artères, aujourd'hui ma joie est d'avoir dominé le monstre. Le centre est vivant, grouillant mais peut être par lassitude, par overdose me laisse un sentiment mitigé, je n'ai pas eu le coup de coeur espéré. En soirée je m'extrais de la bête, fuis sur les berges du Rhin et m'endors... apaisé malgré les hordes de moustiques assoiffés de sang.

Le 26/07. La plaine du Rhin est un terrain propice au vent de face qui s'en donne à coeur joie de contrarier mes efforts. Petit détour par Baden-Baden, ville d'eau enfin... thermale ! Cette station est superbe, la chaleur lourde, les curistes silencieux, l'atmosphère d'hôpital. Couché sur ma monture, le vent se déchaîne. Voici Kiel, un retour après un passage il y a 2 ans. Rien n'a changé, mais j'évite Strasbourg et surtout sa zone périphérique. Je passe le Rhin, la France... Perdu dans la forêt, 2h de galère pour me sortir du guêpier et retrouver le Rhin à la nuit. Brève soirée, dommage pour une dernière !

 

 

Le 27/07. Départ 6h. Le vent est méritant, il est déjà au boulot. Une attention toute particulière à mon alimentation, Fessenheim, Mulhouse, Belfort. Epuisé après ce raid de 160 km, je retrouve mon point de départ. Ce périple aura été le plus dur mais ma satisfaction plus grande encore. Laissons reposer la tête et le corps quelques jours, pour mesurer, estimer, juger des effets de cette aventure.

 

 (fin)